Samedi 12 juin 2021. Météo déjà torride dans la vallée de la Drôme. Des envies d’observations naturalistes, mais sans crever de chaud ! Les tergiversations furent brèves : un bivouac au col de la Bataille ça sera. Ce superbe spot du Vercors drômois attire de nombreux touristes, mais aussi des ornithologues au printemps et à l’automne. C’est en effet un couloir migratoire très emprunté par les oiseaux, et il y a toujours quelque chose d’intéressant à y voir.
Aujourd’hui, j’ai un plan bien précis en tête : observer, et pourquoi pas photographier, l’un de nos plus beaux oiseaux de montagne, j’ai nommé le monticole de roche !
Pourquoi faire une heure de route, en embarquant tente, matelas et vivres pour 24h, pour un oiseau à peine plus grand qu’une sittelle torchepot ?! Parce que la bestiole est plutôt rare, et qu’elle est sacrément jolie ! Et cela suffit amplement lorsqu’on est un passionné de nature, d’autant plus qu’une telle quête sera le meilleur prétexte pour fuir les vapeurs pré-estivales du fond de vallée 🙂
Bleu, orange, blanc, marron et chamois : le monticole mâle est, d’après les photos que j’ai pu voir, un vrai bijou d’oiseau, surtout en période nuptiale. La femelle, comme souvent chez les passereaux, a une robe plus terne. C’est une loi de la nature !
Ces migrateurs sont des oiseaux exigeants quant au milieu choisi pour évoluer et se reproduire. Il faut en effet aller les chercher dans les alpages rocailleux et pentus à plus de 1500m d’altitude.
Après inspection de la carte IGN, lieu de bivouac et de prospection de l’oiseau sont actés. Je me dis que mes meilleures chances de les croiser sont aux premières heures de la matinée, sur un versant bien éclairé par le soleil. Je camperai donc la veille, près du site, pour être d’attaque dès l’aube, ce qui est toujours mieux pour la photo.
Arrivé sur place en fin d’après-midi, je fais une première balade dans le secteur pour observer la flore printanière, et profiter d’un superbe coucher de soleil avec des vues imprenables sur les différents sommets du Vercors.
Pas de monticole ce soir, et peu d’oiseaux de manière générale : juste quelques grands corbeaux et un faucon crécerelle, en chasse au-dessus des prairies d’altitude.
Après une nuit humide et venteuse, le chant d’une alouette me réveille à… 4h50 ! Impossible de me rendormir, et de toute façon il ne vaut mieux pas, si je veux marcher à la fraîche.
Je me mets en marche vers 6h, à flanc de montagne totalement ombragé. La montée est raide, et je mets plus de temps que prévu pour grimper au sommet. En chemin, je croise des petits oiseaux dont je ne suis pas sûr de l’identification. Je pense à des traquets motteux, mais non ils sont plus petits.
Arrivé enfin au sommet, je retrouve le soleil, mais surtout le vent ! Un puissant courant nordique, qui rend la photo de fleurs et de paysage très très difficile. Tant pis, vous ne verrez pas les parterres tapissés de jonquilles blanches !
A ce point précis, je me fais de moins en moins optimiste pour espérer observer mon petit merle coloré des alpages. Avec tout ce vent, les oiseaux doivent forcément se cacher ! Je décide alors de passer de l’autre côté de la montagne, sur le flanc éclairé par le soleil. Ici déjà, beaucoup moins de vent.
Tout à coup, à quelques dizaines de mètres plus bas dans la prairie juste au-dessus de la hêtraie, je vois défiler un chamois. Je ne m’y attendais pas !
Quelques instants après, je vois aussi une biche la langue pendante, comme si elle fuyait quelqu’un ou quelque chose… Vais-je surprendre un loup ??! Non, ça ne sera pas pour aujourd’hui.
Mais là-bas, à 40 mètres devant moi, qu’est-ce donc que cet oiseau dont la tête dépasse du rocher ? Les jumelles me donnent vite la réponse : un monticole de roche !!
Quel bonheur de pouvoir observer cet oiseau, dans ce cadre exceptionnel !
Je m’assois tranquillement dans l’herbe pour profiter du spectacle, même si je suis trop loin pour faire des portraits rapprochés. Le problème c’est que je n’ai pas de cachette, si je veux tenter de m’avancer un peu.
Après quelques minutes d’observation, je me décide à bouger pour aller voir si je ne peux pas voir la femelle. Un petit groupe de chocards à bec jaune me tient compagnie.
Une centaine de mètres plus loin, je revois le monticole posé en haut d’un rocher. Non deux ! Voilà le couple 🙂 Ils sont loin, mais au moins je peux cadrer les deux oiseaux sur la photo.
Je n’ai pas le temps de faire un mètre pour essayer de m’approcher un peu qu’ils s’envolent déjà, hors de ma vue. Je me dirige vers l’endroit où j’ai vu le mâle partir, et très vite je le revois, en contrebas du chemin. Il reste sur place quelques secondes, juste le temps de lui tirer à nouveau le portrait.
A cette heure-ci de la matinée malheureusement, la lumière est déjà forte et chaude et la netteté ne sera pas totalement au rendez-vous.
Peu importe, aujourd’hui ce qui a le plus compté pour moi, c’est d’observer une espèce très peu commune, dans son milieu naturel !
En redescendant retrouver ma voiture, je croise des papillons, un couple de faucons crécerelles, puis plusieurs petits oiseaux comme ceux croisés en montant. Je m’assois dans l’herbe en attendant que l’un veuille bien se poser en évidence.
Ce n’est qu’en rentrant chez moi plus tard que je me rends compte que ce sont des pipits spioncelles : une autre première observation pour moi ! Dans la famille des pipits, j’avais bien déjà observé les pitits farlouses (une histoire illustrée à lire ici) et les pipits des arbres, mais jamais cette variété-là.
Au sol, les pipit sont plutôt bien camouflés, malgré leur plumage nuptial légèrement rosé, sur la poitrine.
Même posés bien en évidence sur une branche de pin, le plumage de ces oiseaux s’intègre très bien dans le décor.
Voilà pour cette nouvelle petite aventure au contact de la faune sauvage des montagnes drômoises ! Je vous dis à très vite pour une nouvelle histoire 🙂
Tellement magnifique et inspirant!
Merci Richard
Merci Antso !! J’espère que tu vas bien
LOVELY!
MERCI !
Encore un magnifique reportage au cœur de la nature et d’un massif que j’aime tellement : le Vercors !
J’ai des souvenirs du col de la Bataille et du Roc de Toulau, si je me souviens bien …. Somptueux paysages !
Merci Richard de nous faire voyager, et de continuer à nous émerveiller avec tes découvertes et ton objectif !
Bises et amitié !
Tu as bonne mémoire Odile ! Merci beaucoup pour ton commentaire 🙂
Encore une magnifique histoire racontée par un poète; je suis toujours aussi impressionné par ton approche de la nature et ta façon de nous faire partager tes émotions; j’attends la prochaine avec impatience.
J’ai déjà observé un monticole en Espagne, mais jamais de pipit spioncelle.
Merci Richard